Collobrières
Dans mon
enfance à Collobrières , je fréquentais peu les enfants du
village : ceux-ci me houspillaient en m'appelant «
banette « (un haricot , allusion a mon nez aquilin )
J'avais
cependant un groupe d'amis voisins , de la famille Natter qui
habitaient , le reste de l'année a Toulon . Il y avait d'abord :
Marie-Paule , l'ainée puis : René-Jean qui devait , plus tard
, se suicider ; Jean-Pierre , le favori de sa mère car il
n'était pas du même père ! et le petit Dominique que chacun
portait a son dos quand nous remontions la rivière …
Sandales
plastique aux pieds , on pataugeait dans les eaux déjà basses
du Réal-Collobrier , on farfouillait a mains nues dans
les racines des aulnes pour attraper les anguilles . Autour de nous
des chevesnes mais surtout des barbeaux et les couleuvres vipérines
a l'affût au fond de l'eau qui se détendaient et saisissaient
souvent un poisson bien plus grand qu'elles !
On
remontait encore jusqu'à la bambouseraie : de magnifiques
bambous noirs qu'on chipait au proprio pour se fabriquer nos cannes a
pêche …
Il y
avait en ce temps-là une scierie près de la rivière , celle de
Guipponi ; et un jour avec René-Jean on trouva entre les piles
de planches : une grosse lentilles de verre .Celle-ci avait
été dérobée aux illuminations du village et réclamée en vain
par la publication du garde-champêtre …
Quand
nous l'avons rapportée a la Mairie , on nous a regardé
bizarrement ! Le doute était dans l'air ! mais
notre innocence nous protégeait !
Une
autre fois l'équipe toujours en vadrouille , Jean-Pierre avait
piétiné avec délices le linge étendu a sécher sur l'herbe . Les
plaintes étaient remontées jusqu'à Mme Victor et Mme Béchon qui
avaient affirmé : « nos petits enfants ne sont pas des
menteurs ! «
On
visitait aussi les maisons inhabitées qui étaient nombreuses a
cette époque ( le village était passé de 3000 a moins de 1000
habitants ) Je me rappelle avoir grimpé , dans une fente entre deux
maisons , en appui entre le dos et les jambes !!!
Nous
nous rassemblions avec d'autres voisins sur le toit en ciment d'une
ancienne remise où Marie-Paule et Marie-Claude , en tutus , nous
régalaient d'une danse artistique ...Tout cela se faisait avec des
piaillements qui tenaient tout le quartier au courant de nos faits et
gestes !!!
Particulièrement
bruyants étaient les jeux autour de la fontaine : on tournait
la manivelle et on dirigeait le jet pour s'asperger ( plus tard la
Mairie la ferait fermer pour garantir la sieste des voisins ! )
Il y
avait aussi les razzias sur le prunier Reine-Claude du jardin du Curé
jusqu'à ce que la bonne nous fasse fuir !!!
En ce
temps-là , dans les rues , les ampoules étaient presque toutes
cassées car c'était le grand jeu , au lance pierre , des enfants
natifs du village . Plus tard ils
continueraient en truffant de plombs les panneaux de signalisation au
retour d'une chasse infructueuse !
Plus tard ils
chasseraient de nuit le sanglier avec de puissantes torches !
Plus tard ils
se retrouveraient midi et soir au bar chez Borrelo pour écluser de
nombreux pastis !
Et le
soir mettraient leur femme a la porte pour leur apprendre le respect
et la docilité !
Il y
avait malgré les apports d'immigration italienne pas mal de
consanguinité car les filiations n'étaient pas garanties .
Il y a
eu des incestes , des morts suspectes.
Dans mon
quartier les petites vieilles tombaient comme des mouches ;
naturellement , elles avaient toutes le même médecin :
Un praticien atypique qui élevait des
faisans dans des carcasses de voitures !
A un
certain moment le village s'est pris d'une passion pour l'argent
facile ; on a vendu a très bas prix maisons et terrains pour
s'acheter : frigidaires , cuisinières , machine a laver ;
tous les délices du monde moderne !
Et
c'est là que le village a commencé a perdre son âme !
Plus
tard pour attirer les touristes toulonnais on multiplierait les fêtes
a visée commerciales ; on irait même a faire couler le vin
dans la fontaine devant la Mairie !!!
Mais
nous autres , enfants de la ville en vacances a Collobrières ;
nous étions protégés par notre réelle INNOCENCE .
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